dimanche 21 mars 2021

 

Montagne d'Aujour


  Anamorphoses alpines : figures de la matière originelle tourmentée, lave ou calcaire qui accède à la forme après un douloureux barattage et le travail subséquent d’une matrice architectonique. Cette impression de vie que donnent une à une les montagnes vient sans doute pour partie de ces brusques changements de leur forme en fonction d’un point d’abordage, ou d’un simple point de vue : depuis le nord venté, ou le sud atone, depuis l’est ou l’ouest. Par étirement ou écrasement, par contraction, constriction, élévation ou excroissance… la montagne vit en changeant de forme, en se métamorphosant sous nos yeux à chaque étape de la promenade.

   Alors, en profondeur, ce n’est plus à cette forme-silhouette subissant trop de métamorphoses que l’on pourra la reconnaître, mais bien plutôt à une certaine physique maternelle de ses flancs, au plus ou moins prononcé, ou à l'indenté, de ses arêtes, aux couleurs entrecroisées de ses échiquiers minéraux, et puis à ses cicatrices et écorchements irrémédiables, à sa peau d’herbe et de terre, ainsi qu’aux fourrures, sombres, éclatantes ou sépia en ce mois de mars, des forêts de hêtres, de pins.