Mont Dauphin
Pour contrer les cris et assauts nocturnes de quelle mesnie, de quelle chasse fantastique,
fut érigé au pic et au compas, parmi rubans, crucifix et éclats de roche, le
fort du Mont dauphin ? Au plateau
des milles vents, dans le guillestrois.
Des quatre coins de France des soldats vinrent scruter l’Alpe,
avec des yeux de Gorgone, avec les yeux du Roë, prisonniers de l’ivre géomètre
qui traça tranchées, arsenaux et casemates.
Des boulets en guise de pupille, les canons voyaient arriver
le Savoyard nomade.
Vauban.
Lignes droites du vertige et de l’attente, arsenal butiné
par les rayons du soleil. Et en bas coulait mêmement la Durance jusqu’à la
cluse de Sisteron.
Le vide limoneux, l’attente claire et minérale à peine
adoucie par les bruits de la forge.
Ils attendaient que l’histoire vienne frapper à la porte de
Briançon, jouant aux cartes et aux osselets, tannant le cuir, frappant le fer.
Durant plus de trois siècles.
Trois petits coups l’histoire sonna, portes ballantes, un
pan de l’arsenal fut réduit en poussière par l’Italien nomade, lors de la
deuxième guerre mondiale.
Le fort avait traversé le temps, l’eau de la Durance cheminé
dans les crânes. Et le soleil
butiné à satiété aux échauguettes et casemates.
Et c’est alors que la Mont Dauphin devint ce qu’il avait
toujours été, un temple consacré à Diane, aussi parfait qu’une pleine lune en
hiver.
Portes ballantes, il suffit d’y rentrer pour s’en assurer.
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