Le « C » est enveloppe
vide, coquille de noix fumante trouée à l’Orient, à l’image du Caillou.
« C » de caillou, le « C » caillasse, de calcaire, charnier, casse, clapas, etc, de toute chose ayant à voir avec la pierre étourdie parfumé au thym ou le caillou sonore, avec la caillasse, couverte d’ecchymoses bleuâtres, des rivières de montagne ou avec le cinglant, le pétaradant gravier des routes refaites, ayant à voir avec la falaise qui vous nargue et écrase de son ombre cramoisie ou avec le rocher qui vous envoûte ; avec la sourde montagne qui croît dans votre dos…
(La pierre, Le caillou est à cheval sur plusieurs dimensions, celle du grain de sable et celle de la montagne.)
« Coquille sans fruit »
pourrait-on dire de tout déchet de calcaire, granit, gneiss, péridotite… pourrait-dire
de tout caillou, caillou accumulé, tombé, disséminé pulvérisé, contre lequel
butte le pied ou le regard… Enveloppe remplie, comblée d’une autre enveloppe
enveloppant la peau d’une peau, et ainsi de suite, jusqu’à la moelle de néant,
jusqu’au Rien radical, plus radical que la poussière des chemins .
Le caillou est en fait privé de
peau et partant d’intérieur, comme d’extérieur ; ou plutôt son intériorité
est aussi une extériorité, une extériorité qui s’ignore, qui est rejetée hors
de la Vie manifeste. Et cela interroge...
Il est rejeté à l’extérieur comme tout ce qui
a fait irrémédiablement son temps, le caillou. Il est tout entier os temporel
dénudé de sa chair, hors de la vie manifeste et pourtant socle de cette
dernière, car il est aussi une peau, ou une croûte qui recouvre la terre de
part en part, la protégeant, et nous protégeant d’elle.
Caillou, pour les enfants :
intéressant pour ses propriétés contondantes, pour son sifflement dans l’air des vacances
d’été. Sifflement d’œuf sourd.
Œuf sourd. On l’entend fatalement
siffler dans l’air de l’été, quand on est encore enfant, le caillou, la pierre
sifflante des guéguerres enfantines, siffler cette creuse enveloppe lancée à
l’ennemi, et parfois renvoyée à l’expéditeur...
Œuf lancé, oeuf fatal, destiné à provoquer
quelques drames familiaux, à générer quelques problèmes sanglants avec le
voisinage. Pendant l’enfance, caillou-outil, caillou-arme… comme il le fut pour
l’homme d’avant l’Histoire.
Pour l’adulte le caillou est
mystère des origines et des fins. Plus profondément est peau recouvrant la
terre, à l’endroit de ses volcans et des blessures anciennes, formant ainsi des
cicatrices pyramidales des cicatrices bossues, des cratères borgnes et des gorges
siphonnées, et puis des vallées de
larmes, et de fumants déserts de sable sans aucune valeur ; formant des regs qui
emprisonnent l’Afrique.
Pour l’adulte contemplateur et
poète : est Pierre, sainteté de la pierre dépouillée de toute vie
manifeste, pierre à la franchise aiguisée et extrême, taillé dans l’ascétisme
des sommets ou des mines, pierre surgie de la matrice des éons , pierre tout
entière dévouée au temps, tout entière prise dans la gaine du temps dans sa
version, dans sa fonction, d’ Eternité
sourde.
Pour le maçon est simplement
fragment de mur à reconstituer, élément inconscient d’un futur puzzle
architectural et sonore (le vent qui joue sur la pierre). Est musique, est note
à placer sur la portée d’une muraille où pianotent les lézards.
Pierre, caillou creux et musical.
Pour d’autres est Œuf de soleil
et de temps pondu par la montagne, œuf à saisir, inspecter, à soupeser puis
lancer dans l’oeil d’une flaque, d’un cratère, dans l’œil du vide en contrebas,
pour une omelette sonore.
On entend alors la musique de la
dégringolade, le ramdam provoqué par la chute de ce creux , de ce caillou musical, ainsi que, à flanc de
falaise, les chocs des extériorités provoqués à répétition par le caillou, le caillou,
caillou, caillou tombant, dégringolant, sans intérieur, sans extérieur, vide et creux caillou pressé de rejoindre la caillasse de calcaire des casses à cailloux.
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